On vous a certainement dit un jour ou l’autre ce genre de phrases :
- Tu joues trop fort !
- On entend que toi !
- Ce n’est pas très fin !
- Je n’entends plus ce que joue !
Ou à l’inverse :
- On ne t’entend pas !
- Sois plus présent !
- Tu ne peux pas jouer plus fort ?
- Ta batterie ne sonne pas …
Le quotidien du batteur dans un groupe n’est pas toujours facile à gérer lorsqu’il s’agit de volume sonore.
Que celui-ci soit trop faible ou trop fort, cela peut poser d’immenses soucis lorsque nous ne savons pas comment gérer ce paramètre essentiel de la musique : le volume de notre batterie.
Voici donc quelques trucs pour vous aider à dépasser les frustrations induites par le volume de votre instrument.
Les nuances, qu’est-ce que c’est ?
On retrouve la notion de nuance dans de nombreux domaines liés ou non à l’art.
En peinture, une nuance fait référence aux différents degrés d’une même couleur, du plus clair au plus foncé.
En musique, il s’agit des différents degrés de l’intensité sonore, du plus faible au plus fort.
L’intensité sonore souhaitée par le compositeur est généralement indiquée sur les partitions que nous jouons.
Elle se note assez précisément grâce à des symboles graphiques codifiés et employés par l’ensemble des musiciens.
Ces symboles vont du piano(doux ) au Forte (fort).
Hormis cette notation graphique, les différents degrés de nuances sonores exécutables sur un instrument ne sont à mon sens pas quantifiables tant il y a de variantes et d’innombrables stades possibles d’exécution.
Mais comment parvenir à jouer l’ensemble des nuances sur notre instrument ?
A quoi sert une nuance ?
A mon sens, la nuance est l’outil par excellence pour parvenir à susciter une émotion chez l’auditeur.
La nuance soutient les autres musiciens dans leur jeu.
Jouez trop fort et vous dérangerez les autres en prenant leur place.
Jouez trop faiblement et vous manquerez cruellement aux autres. La confiance du groupe en souffrira car il y aura littéralement un trou dans le son du groupe.
Elle favorise l’émotion dans la musique.
Une musique forte et puissante peut donner un sentiment de surprise, de libération, d’exaltation. Elle favorise l’envie de bouger/ de danser.
Une musique douce donnera un sentiment de sécurité, de relâchement, ou tout au contraire un sentiment de tension, de suspens si elle est associée à des accords mineurs.
Une question d’équilibre
Tout est une question de dosage car il ne suffit pas de jouer fort pour que la musique fonctionne toute seule.
Tout comme le sel en cuisine qui permet d’intensifier la perception des saveurs, les nuances en musique se doivent d’être bien dosées.
Un plat trop salé est immangeable, une musique trop forte est inécoutable.
Un plat trop fade nous laissera indifférent, une musique trop faible fera de même.
Une histoire de contrôle
Pour jouer avec des nuances, il n’y a pas de secret : il faut contrôler ce que l’on joue.
Sur la batterie, cela se traduit par le contrôle des baguettes et de la frappe.
Une incapacité à contrôler ses nuances peut montrer deux choses :
- un problème dans la technique sur l’instrument
- une barrière ou un blocage mental du batteur
Cela concerne tout aussi bien le fait de jouer fort que de jouer doucement, ou à un volume moyen.
Cela peut aussi se traduire par des difficultés à jouer les nuances de passage dites intermédiaires ou medium (les mezzo forte et mezzo piano, les crescendo et decrescendo).
Pour maitriser les nuances, il faut maitriser sa technique.
Voici donc une excellente occasion pour travailler notre instrument.
Jouer fort, vraiment fort !
Pour produire un son sur une batterie, il faut frapper la peau ou les cymbales.
Il est donc logique de penser que pour jouer fort, il faut taper fort !
Facile me direz-vous ! Peut-être pas en fait ….
Avez-vous déja essayé de jouer vraiment très fort ?
Pas si évident ! Surtout si vous devez garder ce volume sur la durée…
Pour jouer fort sur votre instrument, vous devez apprendre à ne pas bloquer vos mouvements, à lâcher vos mouvements
Toute l’énergie que vous déployez passe-t-elle correctement de votre bras à la baguette ? De la baguette à la peau ?
N’y a-t-il pas un endroit dans votre bras où vous bloquez le mouvement ? Cela peut provenir de votre épaule, de votre coude, de votre poignet, de vos doigts…
Imaginez que votre baguette est un boulet de démolition accroché à une grue géante. Cette grue doit enfoncer son boulet de plusieurs tonnes dans le sol (ici la peau).
Cela ne pourra pas fonctionner si le boulet est accroché à la grue par un bras rigide. Par contre, si le boulet (la baguette) est accroché à une chaine ou un câble flexible (votre bras), la puissance de la grue sera décuplée et le boulet prendra le maximum de vitesse.
Autre astuce :
Jouez un rythme et jouez-le fort.
Maintenant recommencez. Mais, avant de jouer ce rythme, hurlez mentalement le plus fort possible. Imaginez-vous en train de faire tomber les murs autour de vous tellement le son est puissant.
Rejouez ensuite en pensant à cette image. Votre volume a-t-il augmenté ? Certainement, car c’est avant tout dans la tête que la musique se passe.
Petit truc :
Imaginez que le point d’impact de votre baguette ne se trouve pas sur la peau, mais bien 5-10 cm en-dessous de le peau.
Quel est le résultat produit ? Le son sera certainement plus puissant et plus rond.
Pourquoi jouer fort ?
Jouer fort peut vous servir à plusieurs choses :
- Tout d’abord pour accompagner une musique qui nécessite ce volume.
- Ensuite pour vous faire entendre en cas de souci dans l’équilibre du groupe.
- Enfin, c’est un excellent moyen de ressentir les choses lorsque vous travaillez votre technique. Les sensations physiques ne seront pas les mêmes si vous jouez du pad à un volume moyen et avec peu d’implication ou si vous jouez à fond. Au contraire, si vous jouez du pad vraiment très très fort et énormément d’énergie, vous ressentirez surement des choses dans vos doigts, vos poignets, vos bras que vous n’aviez peut être jamais remarquées avant. Cela mettra en avant vos forces comme vos faiblesses techniques. Et cela n’a pas de prix de pouvoir ressentir les choses afin de corriger un défaut ou de travailler un atout.
Comment faire pour jouer doucement ?
La première et la moins bonne des solutions peut consister à changer de baguettes (les balais ou les sticks par ex), mais je ne le recommande pas. Vous pouvez prendre des baguettes moins lourdes.
Je considère qu’il est tout à fait possible de jouer très doucement avec une batte de base ball qui pèse 2 kg … C’est juste plus difficile
Pour jouer doucement, il vous faudra réduire au maximum l’amplitude du mouvement de vos baguettes.
Pour cela, réalisez ce simple exercice :
Jouez un rythme sur votre batterie ou sur un pad. Continuez de jouer ce rythme et sans rien changer, essayez de diminuer l’intensité/le volume de celui-ci à l’extrême jusqu’au stade où vous ne pouvez plus le jouer.
S’ il est logique de penser qu’un mouvement réduit diminue le volume, on peut imaginer que le volume zéro correspond à un mouvement d’une amplitude nulle.
Essayez de passer de façon fluide d’un mouvement de baguettes normal à un mouvement de baguettes d’une amplitude de seulement quelques centimètres.
Visez un maximum de 2 cm de hauteur entre la peau de votre batterie et la hauteur de frappe de vos baguettes.
Visualisez quelque chose de petit (une tête d’épingle par exemple). Imaginez que vous jouez avec des baguettes en verre, très très fines et très fragiles.
Murmurez mentalement le rythme que vous souhaitez jouer.
N’hésitez pas à exagérer votre objectif.
Le plus difficile
La vitesse et le volume sont deux choses complètement différentes et il est tout à fait possible de jouer très vite à un volume très faible, mais cela n’est pas forcément accessible si vous ne l’avez jamais travaillé.
De même, jouer vite et fort peut s’avérer extrêmement difficile. Pour jouer vite, le temps d’un aller retour de baguette vers la peau sera très court. Vous avez donc peu de possibilités pour prendre le recul et l’élan nécessaires pour que votre baguette produise un son puissant.
Cela demande simplement plus de maitrise de vos baguettes et de vos mouvements.
Un exercice de contrôle :
Prenez n’importe quel rythme sur un pad ou la batterie. Essayez maintenant d’accélérer ce que vous jouez au maximum sans changer le volume d’exécution.
Commencez d’abord par jouer ce rythme très fort et très lentement, passez ensuite à très fort et très rapide.
Faites de même en commençant très doucement et lentement et en poursuivant doucement et rapidement.
Concentrez-vous réellement sur le volume que vous produisez et non pas sur les difficultés techniques que vous pourriez rencontrer.
Comment choisir le bon volume ?
Voici sans doute le point le plus important concernant le volume.
Quand jouer fort ? Quand jouer doucement ?
Super facile : posez-vous ces questions la prochaine fois que vous serez derrière votre instrument :
- Le volume de ma batterie couvre-t-il les autres instruments ?
- Est-ce qu’on entend ma batterie ?
- Y a-t-il une partie de mon instrument (tom, cymbale, grosse caisse) qu’on entend moins bien /plus fort que les autres ?
- Est-ce que j’entends tous les instruments autour de moi ?
- Si je joue plus fort, est-ce nécessaire pour la musique? Cela at-il du sens ?
- Si je joue plus doucement, cela apporte-t-il quelque chose à la musique ?
Ces questions feront réellement de vous un meilleur batteur, et tous les autres musiciens vous remercieront pour votre clairvoyance et le soutien que vous apportez au groupe.
Question volume, un piège pour amateurs.
Les autres musiciens montent leur volume à l’exécution d’un solo et oublient de le réduire après ; je n’entend plus sonner ma batterie. Je monte mon volume de frappe, ça devient un son pourri de garage et on ne sais plus qui à commencé ! …
Bonjour
Très bon papier, ce qui fait un bon batteur est aussi en grande partie la musicalité dans le jeu, jouer avec son coeur, jouer avec ses tripes, pour cela je pense aussi que le métronome peux être une barrière à l’émotion dans le jeu (c’est mon ressenti).
Merci pour tout ces conseils
Arno, Nantes
Et bien je me rends compte qu’un pianiste est un batteur dont la baguette est son propre doigt ! Si le poignet est bloqué, le son sera dur est finalement sans ampleur. Si chaque articulation laisse passer l’énergie jusqu’au doigt, le son est ample et puissant. On parle beaucoup de poids du bras au piano. Peut-être qu’à la batterie le poids du bras ne sers pas, mais plutôt celui de la baguette 🙂 Bien sûr ici il ne s’agit pas de laisser la baguette sur la peau contrairement à la touche… Mais je retrouve le principe de l’attaque de début de son.
Et oui, il est courant de constater aussi qu’aller vite a tendance à faire jouer plus fort…
Merci pour cette vision pro de la batterie. Très intéressant pour moi de trouver des liens, pour les principes universels entre musiciens.
Salut,
Article intéressant et qui concerne quasi tous les batteurs, j’imagine. Personnellement, j’ai tendance à frapper comme un bûcheron, et trouver la subtilité de jouer finement ne dure pas longtemps, comme si finalement, cette envie de “taper” revenait vite à la charge.
Chez les grands débutants comme moi, c’est pas facile, je suis absorbé par l’approche technique , l’envie d’être carré, il faut taper juste, régulier, dans le tempo, l’endurance, la posture…. il y a pas mal de paramètres à gérer.
J’ai envie de te dire, le contrôle du volume, ça vient après, une fois que d’autres aspects techniques sont déjà bien maîtrisés. Enfin c’est ce que je ressens, mais je sais aussi que ce n’est pas vrai pour tout le monde. Enfin comme régulièrement, tu abordes un sujet délicat qui a le mérite de relancer la réflexion sur ce sujet assez important.
Bonjour Xavier,
Pour ma part, j’ai tendance à jouer trop soft. j’ai encore de quoi jouer moins fort mais pas beaucoup. Par contre jouer fort me demande effectivement une forte concentration.
Merci pour cette vidéo très intéressante.
A++
Régis
Salut Xavier,
Chaque batteur est effectivement concerné un jour ou l’autre par le volume sonore. Quand on débute, on a tendance à jouer trop doucement de peur de mal faire. Ensuite, on prend de l’assurance, on se lâche et on joue souvent trop fort. Il faut alors prendre conscience que toute la beauté du jeu vient souvent des nuances (même dans le métal !).
J’ai effectivement expérimenté 2 choses :
– quand on cherche à jouer plus vite, on a également tendance à jouer plus fort et il faut faire un gros effort de maîtrise au début,
– pour placer un accent, élever la voix à ce moment-là en comptant est une excellente aide.
En tous cas, merci pour ce très bon article et … sympa le nouveau logo !
A+
Bonjour Xavier,
Merci pour cet article, toujours très pédagogique comme tous les précédents. Sur les nuances, au-delà de respecter les autres musiciens, il est clair pour moi qu’elles doivent servir à plusieurs choses :
– adapter son jeu au type de morceau que l’on joue; exemples parmi d’autres pour ce qui me concerne : jouer en douceur pour les bossas novas, les ballades jazz ou soul, le blues lent etc…, Jouer en medium (fort mais pas trop) pour les blues rapides, le jazz swing type big band, le funk très syncopé…
– souligner les différentes phases d’un même morceau : exemple sur “Proud Mary” (version Tina Turner) jouer soft en première partie assez lente (tempo 90) puis après un break d’enfer jouer fort sur un rythme plus martelé avec tempo nettement plus rapide (170)
– souligner les solos des autres musiciens, selon l’intensité de leur instrument et du type de morceau; exemples : soft avec crossticks sur solo de guitare acoustique, fort avec frappe pleine peau pour un solo de saxo débridé etc …
– dans un solo de batterie, s’amuser à faire varier les tonalités sur le même tempo en variant crescendo et decrescendo sur les différents fûts, faire ressortir le son des peaux en jouant soft notamment etc…
J’ai dû maîtriser au préalable un certain nombre de points techniques touchant aussi bien la pince avec la baguette pour jouer vite et en souplesse que la souplesse des poignets et effectivement aussi le mental comme tu le précises fort à propos , car beaucoup de choses sont possibles en pensant mentalement le type de nuance que l’on souhaite jouer. Jouer en nuances a été et reste toujours pour moi une vraie découverte de l’instrument.
C’est un excellent exemple que tu soulèves ici.
C’est effectivement un piège très facile dans lequel on peut tomber.
Merci Alain !
Merci Arnaud!
Au début , le métronome peut effectivement être une barrière.
Cependant,en théorie , cela ne devrait jamais être le cas et il y a tout à fait moyen d’utiliser le métronome pour renforcer notre jeu émotionnellement.
Si tu travailles au métronome , essaye de faire corps avec lui en jouant des choses simples jusqu’au stade où le métronome disparait complètement de ta conscience( tout en restant synchronisé avec lui).
Cela mériterait un article à part entière bien sur, car le jeu au métronome est un sujet extrêmement vaste.
Je te remercie d’avoir soulevé la question.
Tout à fait , il y a des points commun entre le le doigt du pianiste et la frappe aux baguettes sur une batterie.
Tout est dans la détente et la gestion de l’énergie…
Je comprend tout à fait que l’envie de ressentir du son et des vibrations soit plus forte pour l’instant.
Le tout est de se connecter à ce dont a réellement besoin la musique en imaginant tout simplement comment cela devrait sonner.
Il est tout à fait compréhensible de te focaliser sur certains points comme la technique.
Si tu incorpores un paramètres en plus, comme le volume, ta technique s’en trouvera elle aussi améliorée car tu utiliseras tout un ensemble de compétences que tu ne soupçonnes même pas avoir pour obtenir un résultat proche de ce que tu aimes.
Tu ouvres la porte à l’émotion et au lâcher prise.
Il faut vraiment voir l’apprentissage d’une compétence sous tous les angles en simultanés au risque d’omettre de gros gros détails qui peuvent, au final, faire toute la différence.
Merci Régis.
Expérimente peut-être pendant quelques temps une approche ou tu développes ton volume sonore dans tes exercices, tu risques d’être surpris du résultat(notamment techniquement).
Merci pour ces conseils Fred.
Merci pour ce retour fort détaillé de tes expériences Denis .
Je suis certain que cela inspirera d’autres batteurs à se plonger dans ce sujet o combien passionnant !
Bonsoir.
Vous expliquez que pour jouer fort on peut imaginer la peau 5 à 10 cm plus loin. On peut penser que pour jouer moins fort on peut imaginer la peau 5 ou 10cm plus près. Ceci permettant de garder l’amplitude et de fait l’énergie, non?
Bien musicalement.
Pat